luni, 30 iulie 2012

POLICIER, ADJECTIF







                                               POLICIER,  ADJECTIF



Corneliu Porumboiu est un cinéaste roumain né à Vaslui en 1975. Il est l’un des plus brillants représentants de la nouvelle vague du cinéma roumain.
Après des courts métrages – Love…sorry (2001), Graffiti (2002), Autant en emporte le vin (2002), Un voyage à la ville (2003), Le rêve de Liviu (2004) – il fait sortir en 2006 son premier long métrage, 12h08 à l’Est de Bucarest, qui lui a valu la Caméra d’or du meilleur long métrage.
Son deuxième film, Policier, adjectif, est sorti en 2009. Avec ce deuxième long métrage, Porumboiu a emporté le Prix du Jury et le Prix FIPRESCI de la section Un certain regard du Festival de Cannes, le Grand Prix, au Festival de Belfort, et le Prix du Meilleur Film, à Barcelone, au Festival du Film européen.
En 2010, à la cérémonie des prix Gopo, en Roumanie, Policier, adjectif s’est adjugé le prix du meilleur film, du meilleur réalisateur, du meilleur scénario, du meilleur acteur (Dragos Bucur), du meilleur second rôle masculin (Vlad Ivanov) et de la meilleure photo (Marius Panduru).
Ce film n’est pas un polar classique. La trame en est policière, il est vrai, mais c’est du subterfuge, attendu que le film débouche sur un cas de conscience et une satire sociale assez cuisante.
Le sujet du film puisé à la rubrique des chiens écrasés renvoie donc à un événement réel. Le cinéaste a avoué, lors d’une interview demandée par Jacques Mndelbaum, le critique du “Monde”, qu’ “à l’origine il y avait deux idées liées à des événements réels. Le premier était un fait divers, l’histoire de deux frères dont l’un trahissait l’autre et le dénonçait à la police pour usage de drogue. Le second est lié au travail d’un ami, inspecteur de police, et qui s’est confronté à un moment de sa carrière à un cas de conscience similaire à celui qu’éprouve le personnage du film.”
Et Corneliu Porumboiu de nuancer:
“Ce qui a titillé mon imagination, ce n’était pas tant les conséquences de ce petit délit ou la décision de justice qui a été prise, mais cette histoire de trahison entre deux frères. Je me suis alors mis à écrire un scénario, à faire des recherches sur la manière dont la police enquête et suit des suspects.” (“Cinémotions”)
Cela dit, revoyons le film!

I.                   LA  FILATURE

Cristi (Dragos Bucur), un jeune policier, file trois lycéens qui fument un joint sur la route de l’école et après les classes. L’action du film se déroule à Vaslui (quelques critiques français ont retenu Bucarest – c’est inexact!), la ville natale du cinéaste. La ville est morne – on est en automne, au mois de novembre, je crois, juste au moment où l’hiver emboîte le pas à l’automne. Dans la rue, les personnages ont presque tous les grelots. A la fin du film, Cristi et Nelu (Ioan Stoica) vont également trembler, mais de peur, cette fois-ci, en présence d’un commandant (Vlad Ivanov) qui se lève presque toujours du pied gauche. Les immeubles sont sales et les fenêtres en ont des barreaux, ce qui laisse pressentir la taule. Le commencement annonce la fin. Et pourtant le policier a l’air très humain et très peuple, en somme.
Les filatures entreprises par Cristi sont restituées en plans-séquence, c’est-à-dire des plans uniques, sans montage ou plan de coupe. Pour un polar proprement dit les plans-séquence seraient un vrai désastre eu égard à leur longueur presque inévitable. Ici, cette manière de filmer qui rend l’action en temps réel nous introduit lentement dans l’atmosphère d’un film social où l’on découvre en même temps que le personnage central  des réalitées grises, filmées avec une précision farouche.
“Et savoir que le jeu en vaut la chandelle”, conclut Philippe Rouyer, le critique de “Première”.
Pourquoi cette préférence pour ces longs plans-séquence?
Porumboiu a avoué quelque part qu’on pouvait révéler “la vérité d’un personnage en le regardant travailler. Et c’est pour cela que j’ai décidé de suivre ce flic filant un suspect en temps réel.”
Cette distance de la caméra renferme d’autres suggestions aussi.
Samuel Douhaire, le critique de “Télérama” fait valoir que “la caméra reste à distance comme si elle était le regard de Cristi épiant en retrait les ados qui fument. Quand le policier entre dans le champ pour récupérer les mégots suspects, la caméra ne bouge pas: Cristi se retrouve à l’emplacement exact des ados, manière de souligner que le flic est, au fond, plus proche des lycéens que de ses supérieurs.”
Cristi file Victor, regardé en suspect principal, parce que cafardé par Alex, un bel-ami, Alex, le mouchard, et une jeune fille – amie des deux - qui, de temps en temps, rend visite à Alex. Ses visites sont louches vu qu’elle a un frère, Iulian Paraschiv, qui va en Italie tous les deux mois et qui a un casier judiciaire.
 Toutes les pistes indiquent celui-là en suspect principal. Cristi a besoin de temps pour ramifier l’enquête et entreprendre la poursuite de Paraschiv, mais ses supérieurs – le procureur et le commandant – lui demandent fermement d’organiser au plus vite un flagrant, d’arrêter les suspects et de s’adonner aux interrogatoires. Cristi trouve que cette “solution” n’est ni passionnante, ni juste. Mais elle semble être convenable pour tout le monde.
Convenable à quoi et à qui?
Convenable à l’Etat et, particulièrement, au Ministère de la Justice qui ne veulent pas rendre justice aux hommes, mais les contrôler, les soumettre par des lois qu’ils n’aient pas besoin de comprendre, qui leur restent extérieures et incompréensibles, d’où le rôle du dictionnaire qui fera l’objet de la III-è partie de ce postage (L’AFFRONTEMENT). Savez-vous qu’en Roumanie on est passible de 3-7 ans de prison pour avoir trafiqué du haschisch? La sanction est énormément dure, mais, si on est coopérant, on bénéficie d’une réduction de trois ans et demie de la peine (à revoir le dialogue de Cristi avec le procureur). A un moment donné, Cristi s’exclame: “Nulle part en Europe, personne n’est arrêté pour un joint.” Et puis, lui, en tant qu’inspecteur de police qui a le nez creux, est convaincu que ce n’est pas Victor le trafiquant. Ses soupçons reposent sur Paraschiv et sur Alex, le cafard, justement parce qu’il a cafardé.
Mais pourquoi l’avoir fait? Il fumait tels les autres, il bénéficiait, lui aussi, de cette herbe… Il est possible qu’Alex ait des contacts avec Paraschiv par le truchement de la fille que le flic a vue entrer dans la villa d’Aurel Iancu, le père d’Alex. Il est possible que Victor soit envisagé en ami naïf et en bouc émissaire, bon à se faire boucler à la place des autres, lui, qui n’a fait que fumer de l’herbe. Le délit est, de toute façon, dérisoire, mais l’injustice de la Justice est énorme. Le procureur (Marian Ghenea) ne veut pas éclaircir le cas et le commandant hâte le flagrant. De toute façon, ce n’est pas par hasard que le réalisateur fait entrer la sœur de Paraschiv, filée par Cristi, dans la villa d’Alex et toujours pas par hasard que cette villa est imposante, qu’elle fait ombrage aux maisons du voisinage qui ne comportent qu’un rez-de-chaussée. Dans l’économie du film, ces détails ne sont pas pour des prunes, ils y sont pour quelque chose. Aurel Iancu, le père (omnipotent?) d’Alex est le chef d’une compagnie AIAN Construct. SA. Cristi apprend ce détail après avoir demandé à ses collègues de faire des investigations sur le numéro d’immatriculation d’une voiture: 06AIC. Ce n’est pas impensable que cet homme si puissant, à la mesure de sa villa, Aurel Iancu, soit mêlé au trafic de drogue, qu’il soit assez influent pour détourner le cours d’une enquête et en imposer un bouc émissaire, dans une société  où un employé n’est qu’un rouage dans le système d’un engrenage dont on n’arrive jamais à deviner celui qui se trouve au levier de commande. C’est quelqu’un d’impersonnel, surveillant la mécanique d'un système qui doit se reproduire sans cesse, afin de rester le même: prévisible et facile à contrôler. Il est presque inutile de dire qu’un tel système ne peut pas évoluer, qu’il enfante “une société cadenassée par la surveillance policière et la bureaucratie.” (Jean-Luc Douin).
Dans un groupe nominal, le mot de base est le nom, le substantif. Les autres mots ne sont que des déterminants, des adjectifs pour la plupart, dont on peut se priver le cas échéant ou les remplacer pour le plaisir. Ce qui compte pour l’ossature, c’est le nom, les adjectifs ne sont que des ornements. Dans la société décrite dans ce film, les employés sont des adjectifs, l’ossature, c’est l’Etat; les adjectifs servent à enjoliver et à dissimuler l’essence et les vrais buts d’un tel Etat: se perpétuer sous la même forme.
Vous comprenez maintenant pourquoi le procureur et le commandant sont si pressés à clore le cas et pourquoi l’Etat est si occupé à brider toute initiative et tout élan à ses employés?
Un type zélé, passionné et opiniâtre comme Cristi, qui écrit de longs rapports méticuleux sur son cas, pourrait avoir la tendance, à un moment donné, de se substantiver, de se proposer en nom et de modifier le cours d’une enquête et, à la longue, le profil d’une société. Pour un tel Etat (policier), un tel individu est dangereux, il ose se proposer en nom, il ose lui faire concurrence. On dit qu’il est arrogant, qu’il ne respecte plus la mécanique du système, qu’il n’y est plus rouage, ni adjectif.
Vous comprenez maintenant pourquoi les collègues de Cristi rechignent à l’ouvrage?
Si vous avez compris qu’ils tiraient leur flemme, vous êtes bête ou faites le bête. Ce n’est pas qu’ils ne veuillent travailler, c’est que toute leur motivation a été tuée. L’Etat n’a pas besoin de zèle, le zèle individualise, l’Etat a besoin d’obéissance et d’uniformité. Ils ont très bien appris la leçon que leur avait infligée Anghelache (Vlad Ivanov), leur supérieur. Ils traitent Cristi pour un “particulier”, alors qu’eux, ils se prennent pour “l’imago”, comme eût dit Blaise Pascal, trois siècles auparavant. Aussi le regardent-ils avec de l’assitude et de l’ironie, mais, finalement, entre deux “pauses café”, ils l’aident à obtenir tous les renseignements que celui-ci, ce bizarre, ce zélé leur avait demandés. Ce n’est aucunement à cause d’eux que Cristi doit renoncer à l’enquête. Cette enquête est obstruée dans le bureau d’Anghelache.

II.                LA  CONVERSATION

Il y a deux conversations qui comptent dans ce film: celle de Cristi avec le procureur et une autre engagée à la maison, avec sa femme Anca (Irina Saulescu), vu qu’il est fraîchement marié et qu’ils viennent de rentrer de leur voyage de noces.
Avec le procureur, Cristi discute du cours de son enquête et de ce voyage à Prague. C’est sa femme qui a voulu y aller, en voyage de noces, vous comprenez? On est un peu choqué par une telle préférence, un peu – comment dirais-je? – trop intellectuelle pour une lune de miel. D’habitude on cherche des destinations plus exotiques et sensuelles, Cristi aurait préféré la mer, en Turquie, mais Prague, c’est énorme! Cristi se rappelle que, lors de ce voyage, il a vu des jeunes fumer un joint dans la rue et des flics s’en battre l’œil. Mais le procureur tente d’imprimer à la conversation une nuance plus…  intellectuelle: Prague, c’est “la ville d’or”, mais nous avons, nous aussi, notre Brasov, toujours une ville d’or.
 “Prague est un peu plus grande”, ose avancer Cristi.
“Oui – concède le procureur – mais Brasov, c’est notre petite Prague, tout comme Bucarest, c’est notre petit Paris.”
L’humour des dialogues est éclatant et nous rappelle que ce film est une comédie.
Mais pourquoi Brasov serait-il “une ville d’or”?
Le procureur nous renseigne que la toiture de l’Eglise Noire aurait été jadis en or: “Voilà à quoi devrait s’occuper l’Etat roumain, à refaire la toiture de l’Eglise Noire” – conclut le procureur, l’air rêveur.
Il est vrai, mieux vaudrait réparer les toitures que d’arrêter des jeunes pour trafic ou consommation de haschisch.
Mais la grande conversation de ce film a lieu entre Cristi et sa femme, à la maison. Cristi est fatigué et mange seul. Sa femme est occupée à écouter sur internet une chanson sentimentale. Et, comme le son est au maximum, Cristi s’en prend aux vers de cette chanson:
“Que serait la mer sans soleil?/ Mais le pré sans fleurs?/ Que signifierait aujourd’hui sans demain?/ Mais la vie sans toi?”
En interprétant ironiquement les vers de cette chanson pour laquelle sa femme le néglige, Cristi prouve encore une fois ses tendences psychologiques de substantivation:
“La mer sans soleil serait toujours mer et le pré sans fleurs, toujours pré.” Le soleil, les fleurs sont des ornements, réductibles à des adjectifs: une mer ensoleillée, un pré fleuri. Cristi a cette tendance, fâcheuse pour les autres personnages du film, de préférer le nom, les faits, la libre initiative, l’action, le présent (aujourd’hui) au détriment des adjectifs, de l’ajournement, de l’obéissance, du futur, ce qui rend, il est vrai, la vie plus facile, mais chaque fois au détriment de celui qui la vit.
Aujourd’hui doit être plus important que demain parce que c’est aujourd’hui qu’on prépare l’avenir. Une société qui néglige le présent et remet l’action pour plus tard est une société condamnée à ne jamais rejoindre l’avenir, l’évolution, vu qu’elle a besoin d’un ajournement pour demander la permission et finalement pour obéir, ce qui rend infantile et entraîne le blocage; le blocage de la substantivation de cette société-là.
Le dernier vers – “Que serait la vie sans toi?” -  est également digne d’attention, du fait que sans toi correspond à sans soleil et à sans fleurs, des syntagmes qui déterminent les noms la mer et le pré et qui sont indirectement sous-tendus par les adjectifs ensoleillée et fleuri. Donc, Toi correspond à des adjectifs, Toi est réduit à un ornement de la vie, Toi est vidé de sa substance.
Mais Anca, la femme de Cristi et professeur de roumain de son métier, est d’un autre avis: pour elle, la mer symbolise l’infini et les fleurs, la beauté. Vous sentez bien là l’influence des idées reçues, n’est-ce pas? C’est par ces idées reçues qu’on fait carrière en Roumanie. J’ai bien remarqué, dès le début, qu’Anca était une… intellectuelle. Elle remarque à un moment donné que dans les rapports que Cristi a écrits s’était glissée une erreuer: il avait écrit niciun/nicio – des adjectifs négatifs, qui en roumain signifient aucun,-e – en deux mots (nici un/nici o), tout en ignorant les dernières normes grammaticales et orthographiques de l’Académie qui imposent de changer d’orthographe et de les écrire en un mot.
Mais Cristi s’en balance et demande l’air relâché:
“- Depuis quand (cette orthographe)?
-         Depuis deux ans”, répond savamment sa femme.
L’humour en est éclatant.
Cette discussion savante porte donc sur… des adjectifs et sur l’évolution contrôlée de ce monde des adjectifs, où les erreurs sont promptement sanstionnées. Vous comprenez? Hein?
Il faut encore remarquer que les noms des personnages qui incarnent la norme et l’autorité intimidante commencent dans ce film par A: Anghelache, le commandant, Anca, l’épouse, Alex, le mouchard, qui obéit toujours à son père, Aurel Iancu, même au moment où il a cafardé son copain; c’est mon avis; c’est ma contribution à l’enquête que le réalisateur n’a pas voulu terminer. En grande amatrice d’Hercule Poirot et de Barnaby, je crois pouvoir m’exprimer à ce sujet…
 Plusieurs commentateurs ont retenu cet aspect des noms propres commençant par A. Bon, mais pourquoi?
Je crois que ce sont des personnages de première ligne, qui comptent pour la société ou, au moins, qui promettent: Anghelache est déjà commandant, Aurel Iancu est le manager d’une compagnie, Alex est un cafard, donc il promet, et Anca observe bien les normes et, pour Cristi, elle est à la maison ce qu’est Anghelache au travail. Tous les deux ont remarqué que le policier avait écrit aucun d’une manière incorrecte. La faute était tout à fait passable vu qu’on avait changé de norme peu de temps auparavant, mais ils sont conformistes et veulent imposer leur conformisme.

III.             L’AFFRONTEMENT

Mais Cristi n’est pas conformiste et refuse de faire le flagrant. C’est avec cette idée dans la tête qu’il entre dans le bureau du commandant. Cette séquence est filmée en plan fixe et veut annoncer un point de vue unique. Au bureau est assis Anghelache (Vlad Ivanov), relâché, très sûr de lui, une petite lueur chafouine aux yeux. Je n’ai pas eu l’impression que le commandant trouvât son plaisir à torturer ses subalternes, mais il voulait à coup sûr les intimider. Il semble dire “L’Etat, c’est moi” et Ivanov est très bon dans les rôles d’un homme du système ou, au moins, qui sait en faire ses choux gras. Je pense aux films 4 mois, 3 semaines et 2 jours, de Cristian Mungiu, L’Autre Irène d’Andrei Gruzsniczki ou à l’opéra bouffe Elizaveta Bam, d’après Daniil Harms, mis en scène par Alexandru Tocilescu.
Maintenant, il est le chef de Cristi, auquel il doit inculquer les principes de l’Etat tout-puissant. Je ne sais pas si Ivanov réalise que le commandant de Policier, adjectif est encore plus repoussant que l’avorteur de 4,3,2, mais il a sa manière intuitive et empathique d’aborder son rôle et ce qui en résulte n’est qu’époustouflant et miroitant.
Et Philippe Rouyer de continuer:
“L’affrontement qui suit entre Cristi et son chef (génialement incarné par l’avorteur de 4 mois, 3 semaines et 2 jours) autour du sens des mots “loi”, “morale” et “conscience” est totalement jubilatoire.”
Mais le critique de “Première” a ignoré le mot le plus important: policier, nom et adjectif.
Eh bien, les mots conscience, loi et policier valent la peine d’en parler.
Il est à remarquer d’emblée qu’ Anghelache ne prête pas d’attention au long rapport rédigé par Cristi. Il a décidé du cours de l’enquête sans avoir lu ce rapport. Il exige le flagrant.
Cristi lui tient tête et refuse de le faire. Il s’explique: il ne veut pas “avoir la vie d’un jeune homme sur la conscience.”
“Qu’est-ce que la conscience?” – lui demande sournoisement Anghelache. Cristi se prend au jeu et entame une définition de la conscience, mais qui ne correspond pas à celle proposée par Gina, la secrétaire d’Anghelache. La comédie devient kafkaïenne au moment où Anghelache demande à Nelu, le collègue de Cristi, d’écrire au tableau ces définitions. On fait appel au DEX (un correspondant du dictionnaire ROBERT en Roumanie) pour confronter les définitions proposées par les hommes avec les définitions éternisées par le dictionnaire de l’Académie. Ce que veut le commandant est d’inculquer aux hommes le doute sur ce qu’ils pensent et ce qu’ils sentent, de les rendre confus et honteux de l’avoir pensé. L’appel au dictionnaire est un appel à l’ordre et l’Académie fonctionne ici comme une police culturelle. Je l’ai sentie, moi, bien des fois, cette présence de la culture officielle comme le bras cultivé de l’Etat. Et je pense que cette scène déroulée dans le bureau d’Anghelache n’est pas tellement kafkaïenne; elle trouve sa force dans une sorte de déjà vu psychologique, où le mot écrit écrase au lieu de donner de l’envolée.
Cristi est de plus en plus confus. On lui demande de lire tout le paragraphe portant sur le mot loi et les syntagmes qui l’accompagnent. Le commandant lui fait remarquer le syntagme homme de loi et son contenu sémantique: “une personne qui applique et respecte strictement la loi”. C’est le moment jubilatoire d’Anghelache: cette définition l’arrange.Cristi n’a déjà plus d’issue.
Mais le jeu continue: on s’arrête maintenant au mot le plus intéressant de la chaîne – policier, qui, en tant que nom et adjectif, entraîne les syntagmes agent de police, roman ou film policier et Etat policier dont l’explication remise par le dictionnaire est “qui s’appuie sur la police et exerce son pouvoir par des méthodes répressives et abusives”.
“C’est une bêtise!” – réagit Anghelache; cette définition ne l’arrange pas.
 C’est le moment jubilatoire du spectateur.

IV.              LA  CHUTE

Cristi va faire le flagrant. Il n’a d’autre issue que d’obéir.
Il semble être résigné, il fait son métier, finalement, et, selon les règles, il le fait bien. Mais, pour le spectateur, c’est la déprime totale: Cristi, notre orgueil, fait son entrée au monde des adjectifs, au monde d’aucun et d’aucune, un monde où la personne humaine est niée et vidée de substance. Cristi, notre orgueil, y est tombé.
Il explique aux confrères le déroulement du flagrant et il le fait d’une voix neutre, professionnelle.
Mais finalement la voix relâchée de l’odieux commandant de police se fait entendre pour combler la mesure:
“Prenez-les doucement, ce ne sont que des gamins.”
Phrase exceptionnelle, il faut en convenir! Et qui n’est pas là pour des prunes! Elle y est pour quelque chose!
Nous parlons d’un Etat répressif, mais qui essaye de dissimuler sa brutalité au moyen des paroles. Il y existe deux réalités: celle des faits et celle des paroles. La réalité des paroles a le rôle de cacher l’autre.

V.                 POST SCRIPTUM

Nous sommes maintenant au générique, le film est fini, mais une jolie mélodie nous attire l’attention. Pas tellement la mélodie, mais ses vers, à propos de cette double réalité dont nous venons de parler. Je vous le dis franchement: rien dans ce film n’est gratuit. “Tout est plein de sens”, comme dirait le poète.
Alors, voyons “ce que disent” les vers:

“J’aime les paroles, tu sais?
Ces paroles sont tout ce que j’ai.
Elles sont ma famille.
Ce que j’aime les paroles!
Et comme je déteste le silence!
Qu’elle est superbe, cette soirée!
Dis-le-moi, mon amour, encore une fois!
Dis-moi que tu es belle
Et que tu deviendras ma femme
Et que nous aurons une fille…”

Hein? Vous comprenez?
Ce sont les mots qui font la réalité et non la réalité qui appelle les mots. Nous sommes sur le terrain de l’illusion et du mensonge qui couvrent tout bonnement la réalité.
Et la fille que " nous aurons” sera le fruit de ce mensonge. Aujourd’hui ne fait que compromettre demain.



luni, 16 iulie 2012

Comment faire un très bon film







                                 Comment faire un très bon film



Il faut d’abord en puiser le sujet à la vie réelle. Ce sujet doit être vrai et  pas absolument vraisemblable. L’inhabituel, le choquant accroissent l’émotion. Le film Intouchables (Ciumaţii en roumain), sorti en salle le 2 novembre 2011, écrit et réalisé par Olivier Nakache et Eric Tolédano, est inspiré d’un fait réel.
A la base du scénario se retrouve l’histoire de la vie de Philippe Pozzo di Borgo, décrite dans ses livres Le Second Souffle et Le Diable gardien.
Philippe Pozzo di Borgo est un homme d’affaires français, d’origine corse, fils du cinquième duc Pozzo di Borgo. L’hộtel particulier de la famille di Borgo, dont on fait état dans le film, existe bien, rue de l’Université, à Paris. Une partie de cet hộtel a longtemps été louée par le célèbre couturier Karl Lagerfeld.
En 1993, Philippe Pozzo, passionné de sports extrêmes, devient tétraplégique à la suite d’un accident de parapente. La mort de sa femme, trois ans après, le fait flipper. De cette déprime totale le sort son auxiliaire de vie, d’origine algérienne, Abdel Yasmin Sellou. L’histoire de la cohabitation de ces “deux gars en marge de la société qui s’appuie l’un sur l’autre” est décrite à travers les deux livres cités ci-dessus.
Abdel Sellou est devenu chef d’entreprise, s’est marié et a trois enfants. Il ne peint pas comme Driss (Omar Sy), son correspondant du film, mais a écrit un livre – Tu as changé ma vie. Philippe Pozzo s’est remarié, a deux enfants et vit la plupart du temps au Maroc.
Olivier Nakache et Eric Tolédano ne sont pas à leur première aventure commune. Ils ont déjà signié ensemble trois longs métrages: Je préfère qu’on reste amis (2005), Nos jours heureux (2006) et Tellement proches (2009).
Leur dernier film, Intouchables, a fait recette: plus de 15 millions d’entrées. En France, le film est arrivé en tête du box-office. Intouchables est vendu dans 40 pays, y compris aux Etats-Unis où les frères Weinstein ont commencé à le distribuer dès le printemps 2012, tout en ayant posé une option pour un possible remake.
Intouchables a eu trois nominations aux Césars 2012, pour le meilleur réalisateur, le meilleur scénario et le meilleur film français de l’année. Il a emporté le Globe de cristal (un prix de la presse française) pour le meilleur film et le meilleur acteur – Omar Sy, qui “fait main basse sur le film” (François Guillaume Lorrain). Ajoutons aussi le Grand Prix au Festival international du film de Tokyo.
Qu’est-ce qui fait de ce film “une réussite totale”, comme fait valoir Eric Libiot, le critique de “L’Express”?
Je crois que c’est d’abord le choix très inspiré des acteurs – François Cluzet, dans le rộle de Philippe, et Omar Sy, dans celui de l’assistant à domicile. Il y a après la part accordée à la spontanéité, à l’intuition et à la sympathie réciproque, fondée sur la patience et sur la générosité. Troisièmement, il y a l’amitié, une vraie et durable, qu’ on reconnaît ne vivre que rarement. Quatrièmement, c’est quelque chose d’assez commun aux films français: c’est l’optimisme qui s’en dégage, c’est l’espoir; et ça donne la pêche. Last but not least, c’est le rire – facile et généreux: eh bien, on s’esclaffe! On s’y abandonne.
Et, François Guillaume Lorrain de conclure:
“On y retrouve tous les ingrédients des grands succès de la comédie française: un tandem improbable, la rencontre des extrêmes, une générosité réciproque, un message optimiste, un mélange de rire et d’émotion.”
L’intrigue en est simple: Philippe est paralysé après un accident de parapente. Le personnage du film n’est pas tétraplégique: c’est une erreur que font la plupart des critiques. Tétraplégique est le personnage du livre Le Second Souffle, qui n’a que les quatre membres paralysés: s’étant remarié par la suite, il a eu deux enfants. Quant à Philippe du film (François Cluzet), celui-ci avoue ne rien sentir “de la base du cou jusqu’à la pointe de mes orteils.” Son seul organe du plaisir – les oreilles. Le film crée les cadres du désespoir justement pour offrir après des raisons pour en guérir, car “si boire est plus important que manger, donner confiance est plus important que boire. Si la soif tue plus vite que la faim, le désespoir gagne encore en rapidité sur la soif “ – notait Alain Bombard dans des circonstances tout à fait différentes et des années auparavant.
Seul et immobilisé, Philippe vit dans son hôtel, entouré de ses employés. Il cherche un aide à domicile qui l’épaule et, par courrier, une femme qui l’aime. C’est vrai, il a de la galette, mais il n’a pas d’amour ni de vrais amis. Mais Philippe sourit tendrement et continue de chercher. Et, lorsque Driss se présente, ce jeune Noir de banlieue qui montre des dents de diamant et crève de vitalité, il semble reconnaître en lui quelqu’un qui puisse faire bouger les choses dans cette triste demeure paralysée par les conventions, qui puisse y apporter un brin de spontanéité, de vivacité et – pourquoi pas? - d’impulsivité. Sa demeure était comme un corps inerte qui faillait perdre sa dernière goutte de sang.
Mais Driss se présente. Non, il ne veut pas passer l’interview d’embauche. Il ne veut qu’une signature au bas de sa feuille “pour les ASSEDIC”, attendu qu’il est “ alternativement abonné à la prison et au chômage.”(Jacques Mandelbaum) Le Noir ne veut que s’en aller. Mais Philippe sent le besoin de le retenir et de l’éduquer un peu:
“Berlioz n’est pas un quartier.”
“Tu ne veux pas travailler. (…) Tu devrais avoir un petit problème de conscience.”
“Je ne peux signer sur-le-champ.” Et il fait ce que font tous ceux qui commencent à avoir de la sympathie pour l'autre: il essaye de gagner du temps, en remettant l’affaire pour le lendemain, à neuf heures.
Le lendemain, il n’est évidemment pas question de signer des papiers. On fait carrément savoir à Driss qu’il est embauché pour une période d’épreuve de deux semaines. On lui présente son appartement qui comporte une somptueuse et éblouissante salle de bains. Driss reste ébahi. A la maison, sa tante,qui avait beaucoup d’enfants, l’avait chassé pour servir de mauvais exemple aux gamins, lui, qui venait de quitter la taule. Driss est épaté, mais se contient et demande “une journée pour réfléchir”.
C’est ainsi qu’il commence son boulot. On lui apprend à être “méticuleux, rigoureux”, on lui fait savoir le rôle des bas et des…gants. Driss se mutine: mettre des bas au paralytique,il accepte, bien que ça“lui coûte”, mais se servir de gants pour essuyer le cul de qui que ce soit, non, jamais. Il a “sa dignité”. Mais, peu à peu, Driss comprend qu’il doit être avec le malade comme cul et chemise.
 Et leur relation va bien. Le Blanc éduque le Noir: “L’art, c’est la seule trace de notre passage sur terre”. Et le Noir comprend plus qu’on ne lui dit. Il n’est pas d’accord que Philippe paye plus de 40.000 euros pour un tableau représentant une tache rouge sur fond blanc. Encore, l’image est-elle violente et émouvante à la fois. D’accord, mais 40.000 euros, c’est trop. Driss est spontané (“ Qu’est-ce que tu fabriques encore?”) et plein d’idées.  C’est à ce moment-là qu’il décide de se prendre à la peinture. Ce qui en résulte, c’est un tableau qui lui procurera 11.000 euros! – une belle somme. L’acheteur est justement le juriste de Philippe qui n’avait aucunement de sympathie pour Driss, étant donné le casier judiciaire de celui-ci, mais il s’émerveille devant le tableau – “Il a du style, de la patte!” – tout en ignorant la personne du peintre, dont on lui dit qu’il venait d’exposer à Londres. C’est une bonne affaire. Ajoutons aussi qu’après la séparation de Philippe, Driss saura reconnaître un Dali.
La soirée passée à l’Opéra est mémorable et à se tordre de rire. La mise en scène est tout à fait excentrique. Sur les planches apparaît un personnage – comment dirais-je? – très feuillu, qui commence à chanter. Driss éclate de rire et a des difficultés à y reconnaître “un homme”, “un homme qui chante”, “un Allemand”. C’est vrai, c’était du Wagner… Il ne comprend pas pourquoi ses voisins s’en prennent à lui et leur réplique, l’air fâché: “Quoi “chut” toi?!”
Qu’est-ce qui apprend Philippe de Driss?
Ô, bien des choses et surtout le côté vrai, surprenant et goguenard de la vie. Ce film célèbre le mariage de “la vieille France paralysée sur ses privilèges et la force vitale de la jeunesse issue de l’immigration”, conclut Jacques Mandelbaum, le critique du “Monde”.
Et François Guillaume Lorrain d’expliquer:
“…les pieds dans les plats et les basquets sur les couvertures en soie, Omar Sy déboule cash, sans pitié, avec son vécu de la cité. Là où il n’y a que tristesse, convention et immobilité, il met un peu de folie, de naturel, de mouvement.”
A un niveau allégorique, l’hôtel de Philippe peut être lu comme le symbole d’un monde fermé, élitiste, figé, sclérosé, qui manque de sang, de vitalité et d’avenir. Un monde qui ne peut plus évoluer. Au milieu de ce monde, Philippe a la sagesse d’inviter Driss à y semer sa semence et à faire continuer la vie.
Qu’est-ce qui apprend Philippe de Driss?
Il apprend de Driss l’essence de l’humour – la cruauté. On est cruel quand on fait des gorges chaudes de quelqu’un. Juste après le moment où Philippe fait valoir que “l’art, c’est la seule trace…” blablabla… Driss lui fait remarquer, tout en mangeant du chocolat, que “pas de bras, pas de chocolat”.
Mais c’est Driss qui aide Philippe à recommencer à aimer. Ce dernier entretenait une correspondance avec une femme qui s’appelait Eléonore (comme moi). Il lui envoyait depuis six mois des poèmes, sans oser lui téléphoner. C’est Driss qui compose le numéro d’Eléonore et le force à lui parler. Il est révolté: “Six mois de poésie. Elle se fout de la poésie. Elle cherche l’oseille, la sécurité.”
On décide de lui envoyer une photo de Philippe, qui le présente “assez bien”, mais immobilisé dans son fauteuil. Philippe n’ose pas la lui envoyer et en choisit une autre. Finalement, il prend rendez-vous avec elle et y va accompagné par Yvonne, une employée de l’hôtel, mais, trop stressé, il renonce à attendre la femme.
Quant à Driss, il décide de changer de cap. Il quitte Philippe. Celui-ci lui offre un album qui ne comporte qu’une photo à son image imobilisée dans le fauteuil. Driss envoie la photo à Eléonore tout en prenant un rendez-vous au nom de Philippe. Il rend visite à ce dernier et l’invite au restaurent où Eléonore va faire son apparition. Philippe est stressé, choqué, mais, finalement, pleure de joie.
.Tout le monde a élogié la prestation d’Omar Sy dans le rôle de Driss, mais regardez bien François Cluzet: discret, il s’exprime par son sourire indulgent, par son regard tendre, par ses lèvres craintives. Tout ce qui lui est resté est concentré dans les yeux.
Finalement, le rendez-vous a lieu.
 L’amour s’oppose à la mort. C’est une preuve que le cœur peut encore rebondir, renaître, qu’il n’est pas encore entré en hiver.

marți, 3 iulie 2012

E TOT PREDICATIVĂ, STIMABILILOR!


                       E  TOT  PREDICATIVĂ,  STIMABILILOR!



Motto: „Ci-gît Piron,/ Qui ne fut rien/ Même pas académicien.” (Aici odihneşte Piron/ Care nu fu nimic la viaţa lui/ Nici măcar academician, bietu’ om.”


La unele televiziuni (Realitatea şi B1), problema predicativei de la examen, transformată brusc, conjunctural şi fără argumente palpabile în subiectivă ministerială atipică a părut tranşată: s-a vorbit fără ruşine de un război al părinţilor cu...specialiştii, recte cu academicienii, care ar fi sărit cu poala plină de argumente în apărarea subiectivei deposedate de drepturi.
Dezinformare şi porcărie mai mare ca cele proferate pe ecranele televizoarelor nu se poate. De ce?
1)      Pentru că părinţii nu aveau de unde să cunoască baremul; ei nu aveau de unde să ştie că, în baremul ministerial, predicativa e subiectivă. Necunoscând baremul, ei nu aveau cum să se opună academicienilor iubitori de subiectivă.
2)      Cei care cunoşteau baremul şi primii care au sesizat Ministerul că baremul e greşit au fost profesorii corectori. Dar aceştia sunt specialişti şi cei mai în măsură să ştie ce li se poate pretinde unor copii de clasa aVIII-a. Profesorilor li s-a dictat să tacă mâlc şi să aplice baremul în prostie. Ei s-au străduit, dar spre cinstea lor, nu au reuşit: au vorbit şi, ajutaţi de părinţi, au protestat on-line.
Ministrul Liviu Pop a avut înţelepciunea să închidă conflictul decretând că, atunci când o problemă ştiinţifică stârneşte atâtea pasiuni printre specialişti, e bine să potoleşti copiii şi părinţii admiţând ca posibile cele două variante aflate în litigiu. Ministrul Pop merită mulţumiri pentru atitudinea înţeleaptă pe care a avut-o.
Dar fraza noastră continuă aventura. Pentru că la Realitatea şi B1 s-a vorbit despre o victorie a părinţilor împotriva academicienilor, fără să se spună ce academicieni au fost întrebaţi şi nici ce domeniu ştiinţific reprezintă aceia în cadrul Academiei, fraza noastră continuă aventura.
În faţa unei formulări atât de tranşante şi neroade, nouă nu ne mai rămâne decât o singură soluţie: să mergem la Gramatica Academiei, ultima ediţie.
Mai întâi să revedem ciudata şi, de acum, celebra frază:

„Ceea ce mă jena era dificultatea răsfoirii.”

 Subordonata „Ceea ce mă jena” este predicativă, ea formând împreună cu verbul copulativ era predicatul nominal al subiectului dificultatea. Argumentele mele le găsiţi în articolul precedent, MINISTERUL  CERCETĂRII  FAŢĂ  CU  PREDICATIVA, din 30 iunie a.c.
Ajunşi în acest punct, cititorul este rugat să lectureze acum sau după ce termină acest articol căteva pagini din  GRAMATICA  LIMBII  ROMÂNE, vol.II ENUNŢUL, Bucureşti, Editura Academiei Române, 2005, p.263-290 şi p. 313-352. Cele două capitole la care mă refer vizează Numele predicativ şi Subiectul. Toţi gramerienii ştiu că, în gramatica structurală, la capitolul Numele predicativ se tratează şi subordonata predicativă, aceasta nefiind decât o formă de realizare a numelui predicativ, care, la nivelul unei structuri ternare – S + copulă + NP, ordinea în frază poate să difere, evident, – spune ceva despre subiect.
Cele două capitole sunt redactate de doamna profesor doctor Gabriela Pană Dindelegan, care a redactat şi capitolul despre Grupul verbal şi multe alte capitole, făcând parte şi din comisia de revizie a întregii lucrări, ca responsabil. Aflăm din GLR, 2005, că numele predicativ „reprezintă o clasă de substituţie (adică de echivalente funcţionale substituibile în acelaşi context verbal) având ca termeni prototipici adjectivul şi nominalul în nominativ (altul decât nominalul-subiect), iar ca relaţie sintagmatică specifică, o relaţie obligatoriu (s.n.) ternară, implicând verbul-centru de tip copulativ şi un nominal subiect.” (p.263)
Dacă facem contragerea (reducerea la elementele cele mai simple) frazei de mai sus, obţinem:
Jenantă era dificultatea răsfoirii, cu NP realizat prin adjectiv sau
Dificultatea răsfoirii era disconfortul meu, cu NP realizat prin grup nominal.
Prin termen prototipic se înţelege „model originar”.
Adepţii subiectivei s-au agăţat cu ghiarele de poziţia1 în frază a subordonatei „Ceea ce mă jena”, subîntinsă de grupul nominal disconfortul meu, pe care l-au luat ca subiect al unui fantezist predicat nominal era dificultatea. Fraza lor prototipică ar fi:
  • Disconfortul meu era dificultatea răsfoirii, frază aproape nereperabilă, care se reformulează corect:
Disconfortul meu era cauzat de dificultatea răsfoirii, ceea ce ne trimite la un cu totul alt tip de construcţie: dispare verbul copulativ, care ia cu el şi predicatul nominal, avem, de această dată, predicat verbal exprimat prin verb predicativ la diateza pasivă, urmat de complement de agent.
Dacă citiţi capitolul Numele predicativ, din GLR, 2005, veţi înţelege că elementul de bază al structurii ternare predicative este verbul copulativ, care face legătura între S şi NP. CÂND SUBIECTUL  SAU  NUMELE  PREDICATIV  SE  REALIZEAZĂ  PRINTR-O  ÎNTREAGĂ  PROPOZIŢIE, DIFERENŢA  DINTRE  SUBIECTIVĂ  ŞI  PREDICATIVĂ  O  FACE  VERBUL  COPULATIV.  El va arăta că am acolo o predicativă şi nu o subiectivă.
De altfel, dacă veţi căuta în GRL, 2005, în tot capitolul despre Numele predicativ şi Subiect,  NU  VEŢI  GĂSI verb copulativ care să dezvolte un predicativ propoziţional şi acela –CULMEA!  - să nu fie o predicativă, ci subiectivă!!!, tot aşa cum nu veţi găsi propoziţie subiectivă formată pe lângă un verb copulativ.
Şi atunci, cine sunt academicienii care au văzut în subordonata plasată pe lângă un copulativ „Ceea ce mă jena era...” una subiectivă?!? Şi din ce gramatică se inspiră dânşii?
Să invoci aici argumente legate de topică şi de intonaţie este pur şi simplu ridicol. Înseamnă să treci la nivelul transfrastic, or itemul era riguros de gramatică, iar copilaşii de clasa a VIII-a nu au idee de nivelul transfrastic, ei abia dacă ştiu diferenţa dintre frază şi enunţ. ŞI, ORICUM, ERA PREDICATIVĂ TOATĂ ZIUA, 24 din 24 de ore, stimabililor!
Ceea ce au dorit inspectorii din Minister a fost să facă uitată predicativa ,prin intimidare, necrezând că în ţara Mioriţei bucălaie vor reuşi să trezească doar îndârjire. Refuz să cred că nu şi-au dat seama că e predicativă şi nu înţeleg de ce nu au cedat în faţa primelor semnalări de barem incorect venite de la noi, ăştia, practicienii, pălmaşii, cu ochii încercănaţi pe ogoarele gramaticii tradiţionale, că aia se cere la clasă în România, structurale şi chomskyene. Au sperat să ne intimideze, au preferat crima împotriva conştiinţei. (Nu sunt prima care folosesc această sintagmă.)
Închei spunând că, în ciuda supărărilor de tot felul pe care le-a adus această vară, mie îmi place. Îmi place că e fierbinte. Fierbinte şi neîmblânzită. Al dracului de fierbinte! Oare ne vom plictisi iar?
Doar „doritul soare” ştie.