La
sfârșitul anului școlar trecut, una dintre elevele mele de la clasa a XI-a C
din Colegiul Național Mihai Viteazul mi-a luat un interviu pentru revista în
limba franceză a liceului - Accents
francophones - pe care o găsiți și pe site-ul CNMV, la Actualizare site →
Materiale. Cum acolo nu a putut apărea tot interviul, fiind
mai lung, și cum eu vreau să le ofer elevilor mei toate răspunsurile la toate
întrebările pe care au vrut să mi le pună, reproduc și aici acest interviu,
care vorbește despre felul cum o limbă și dragostea ta pentru ea, și relația ta
cu ea îți pot nuanța și îmbogăți viața.
- Comme
vous êtes notre professeur de français, nous voudrions savoir ce qui vous a
poussée à embrasser cette carrière, Madame.
- J'étais très passionnée pour la
lecture et pour l'étude des langues et j'ai voulu d'abord continuer et
approfondir cette étude, malgré les conseils de ceux qui me recommandaient
instamment de suivre les cours de la faculté de médecine ou de faire des études
de droit. Mais j'ai décidé finalement de devenir professeur et je ne le
regrette pas, parce que toute carrière a des hauts et des bas et chaque métier
a sa beauté et ses inconvénients. Maintenant, je considère que l'enseignement a
fait partie de mon destin. Et puis le professorat est beau, attendu qu'il vous
met en contact avec des jeunes de plusieurs générations et cela, c'est un
spectacle fascinant: on a l'impression d'entrevoir le parcours du monde, de le
deviner en quelque sorte, on a la possibilité de s'adapter continûment à cette
évolution, d'y participer, de corriger un peu ce parcours, de l'enrichir.
-
Et vos passe-temps? À quoi aimez-vous passer votre temps libre?
- J'aime faire des excursions, je raffole
des musées et des spectacles. Pour moi, un musée est vivant, il abrite des
traces et ces traces aboutissent quelque part, nous révèlent quelque chose,
éclairent le passé, nous aident à nous éclaircir nous-mêmes. Un musée nous
enrichit. Napoléon I-er a enrichi la France en faisant du Louvre le plus grand
musée du monde, vu que Napoléon imposait aux peuples conquis un tribut d'œuvres
d'art. Je raffole également des cathédrales et des monastères. En France, mon
premier coud de foudre a été avec une cathédrale; c'était celle d'Amiens:
blanche, massive, d'une beauté unique, impossible à reproduire, un vrai
<<rêve de pierre>>, comme dit Mallarmé. Je me suis sentie tomber
d'émotion. En Grèce, j'ai beaucoup aimé les monastères perchés des Météores.
Les moines grecs ont su faire s'épanouir les rochers. Ces couvents renferment
la définition concentrée de la civilisation: de la pierre modelée, ciselée,
métamorphosée ou, autrement dit, le devenir du rocher. En Roumanie, j'aime le
Nord de la Moldavie avec ses monastères qui se dressent derrière les collines,
parmi les bois, et qui disent l'histoire d'Etienne le Grand et de tous les
Roumains.
J'aime
encore écouter de la musique classique, voir des films, aller au théâtre;
j'aime lire. Je pense qu'un bon livre vous console des aventures que vous
n'avez pas vécues. Les bibliothèques, les livres sont ce qui reste après nous,
c'est le marc de la vie. La lecture nous apprend à faire le marc... des livres.
-
Comment est-ce que vous avez découvert votre passion pour le français?
- J'étais petite et j'avais appris à
l'école une chanson française qui nous faisait connaître que <<Sur un
chemin, j'ai rencontré/La fille du coupeur de paille/Sur un chemin, j'ai
rencontré/La fille du coupeur de blé./Oui, oui, j'ai rencontré/La fille du
coupeur de paille...>>
La
chanson débordait d'enthousiasme et j'ai compris, toute petite que j'étais, que
le narrateur était tombé amoureux de la fille du coupeur de blé. J'ai alors
découvert que s'il n'y avait pas d'enthousiasme, il n'y avait pas d'amour...
L'histoire de mon commerce avec le français est une histoire d'amour et j'aime
enseigner cette langue et écrire en français (j'ai même un blog en français)
justement pour faire continuer cette histoire. L'amour, c'est la vie.
-
Et alors lequel serait le plus beau moment de votre carrière?
- J'étais avec les élèves de la XII-è,
d'un lycée bilingue. Ils allaient sous peu de temps finir leurs études lycéales
et c'était le jour où ils faisaient leurs adieux à leurs enseignants. Ils
s'étaient proposé d'apprécier l'activité de chaque professeur par une citation
et, comme ils savaient que j'aimais énormément Malraux, mon activité a été
évaluée par une phrase prononcée par Picasso et puisée dans les Antimémoires de Malraux: j'étais donc un
professeur de la catégorie <<Je ne cherche pas, je trouve.>>
Cette
citation m'a fait honneur, même si je l'ai trouvée un peu exagérée. À bien
réfléchir, elle est valable pour l'art où il ne faut pas chercher; tout ce
qu'il faut à l'artiste se trouve parmi ses ressources innées, se trouve dans sa
tête qui n'a d'égales que ses mains.
-
Et le moment le plus amusant?
- C'était une classe de français,
toujours avec des élèves de la XII-è; des élèves de ce lycée. Je leur
enseignais la Francophonie et leur parlais des pays francophones d'Afrique et
de la Guerre d'Algérie (1954-1962). En général, ils faisaient attention et me
posaient des questions pour s'éclaircir. Je leur répondais de bon cœur et
j'étais très animée. C'était un bon moment de la journée. Soudainement, une
élève a levé le doigt. J'ai cru qu'elle voulait me poser une question et, très
volontiers, je lui ai dit: <<Oui, mon enfant.>>
Et,
mon élève de conclure:
"Profa,
s-a sunat."
-
Voulez-vous définir la France en quelques phrases?
- Pour moi, la France, c'est la langue
française. Le français est une voie de communication, un espoir, une partie de
moi-même. Je ne pourrais pas m'en passer. Pour moi, la France, c'est ses grands
architectes qui ont su soumettre la nature pour en faire de l'art.
En
outre, la France s'identifie pour moi à la littérature française: à Racine et
Molière, à Baudelaire, Verlaine, Rimbaud et Mallarmé, les poètes célébrés par
Debussy, le compositeur de l'année 2018, quand nous fêtons 100 de Debussy
(1862-1918), 100 d'impressionnisme
musical. Si Mallarmé a écrit L'Après-midi
d'un faune, Debussy lui a attaché son Prélude...
Je pense également à Marcel Proust, à Ionesco et Beckett, à Malraux, Gide,
Sartre et Camus, à Simone de Beauvoir et Marguerite Yourcenar, à Makine et
Houellebecq. La France est aussi une tache de couleur; et je pense alors aux
peintres classiques - Nicolas Poussin -, romantiques - Eugène Delacroix - et
surtout aux impressionnistes dont Monet et Renoir m'ont émerveillée quand je
les ai vus en original au Musée d'Orsay.
- Si vous pouviez faire changer le système
d'enseignement en Roumanie, vous proposeriez quoi?
- Quand j'étais plus jeune, j'aurais tout
changé. Du tout au tout. Heureusement, le temps est passé, j'ai vielli et je
suis devenue plus sage... D'autre part, le système a beaucoup changé; il a été
plusieurs fois renouvelé. On a de nouveaux programmes et aux examens l'accent
porte sur la production de sens et non pas sur la simple reproduction, ce qui
est bien.
Encore,
l'enseignement roumain aurait-il besoin de plus de sérieux en général, d'un
baccalauréat différencié - il faudrait faire une différence nette entre les
lycées théoriques et les lycées techniques pour ce qui est des programmes
d'enseignement et des sujets au bac.
Il faudrait que le nombre des universités
privées diminue parce que cela implique des diplômes achetés et l'Université
n'est pas une boutique. Tout ne peut pas être acheté. En France il y a des
lycées privés célèbres, mais pas d'universités. Il y a eu, à un moment donné, une simple proposition à ce sujet, mais l'idée a été réfutée à la suite
d'amples manifestations de protestation. Il nous faudrait plus de sérieux et
d'honnêteté. Le bac, lui aussi, devrait être plus sérieux et plus sévère, pas
absolument qu'en France où le bac était un examen extrêmement difficile et
complexe. Le baccalauréat y est considéré la condition principale pour accéder
à l'enseignement supérieur, étant envisagé comme le premier grade
universitaire. En 1970-1985, seulement 65-70% des Français passaient leur bac.
Des années auparavant, la situation était encore plus sombre: seulement 50% des
Français réussissaient à avoir leur bac. Mais les choses ont évolué et cet
examen est devenu plus accessible. À partir de 2012, 90% des Français ont leur
bac.
En
outre, je reproche au système d'enseignement une certaine idéologie
communautaire qui a fait que l'étude de l'histoire - matière d'étude fondatrice
de la culture générale - diminue considérablement.
-
Quels sont vos livres et vos films préférés?
- Mon philosophe préféré est Nietzsche et
mon livre-fétiche est La Naissance de la
Tragédie. Mon écrivain préféré reste André Malraux par son œuvre, sa vie,
ses Antimémoires, son agir - combattant,
l'arme à la main, dans la Guerre civile d'Espagne, du côté des Républicains,
membre actif de la Résistance française pendant la Seconde Guerre Mondiale,
l'un des 4 présidents du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes,
le Président de la Ligue Mondiale contre l'Antisémitisme, le Ministre de la
Culture sous Charles de Gaulle, le plus brillant et énergique Ministre de la
Culture qui ait jamais existé.
J'adore
voir des films. Je ne peux pas entrer en détails. Je dirai seulement que
j'adore Martin Scorsese, surtout celui de Raging
Bull, de La Dernière Tentation du
Christ et de La Valse des Pantins
(The King of Comedy). Je me passionne également pour le cinéma danois et
scandinave. Pour moi, un film fait par un réalisateur danois ou norvégien,
célèbre ou non, ne peut être que très bon. Je le sais d'avance parce que, vous
savez, j'ai de l'expérience.
- Si
vous n'étiez pas devenue professeur, quel métier auriez-vous préféré?
- Mon grand-père - que la terre lui soit
légère - en me voyant si studieuse insistait toujours pour que j'étudie la
médecine. Moi, j'avais trop d'imagination pour un métier si précis. J'ai suivi
ma soif au lieu de prêter l'oreille aux conseils de mon grand-père que j'aimais
et qui m'aimait. Ai-je fait bien ou non?
Est-il bon de suivre sa soif? La question reste ouverte.
De
toute façon, chacun de nous est <<une colonie d'individus>> (Aldous
Huxley) et c'est nous qui choisissons lequel de ces individus sera l'emblème de
la colonie. On n'est pas l'homme d'une seule option. Et puis il faut faire
attention également à l'importance que la société prête à un certain métier.
N'oublions pas qu'on vit par les yeux des autres.
Propos
recueillis par Bianca Sertov - la XI-è C, CNMV, Bucuresti
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